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Assassinat de Jovenel : un État éliminé, un État complice, un peuple oublié

Dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, un président en exercice était abattu dans sa propre résidence. Quatre ans plus tard, l’assassinat de Jovenel Moïse reste l’un des crimes politiques les plus opaques de notre siècle. Une affaire d’État sans vérité, sans procès, sans justice.

Il est environ une heure du matin, le 7 juillet 2021, lorsque des hommes lourdement armés prennent d’assaut la résidence présidentielle située à Pèlerin 5, sur les hauteurs de Port-au-Prince. Le président haïtien Jovenel Moïse est criblé de douze balles. Sa femme, Martine Moïse, est grièvement blessée mais survit miraculeusement à l’attaque.

L’image d’un chef d’État exécuté dans sa chambre à coucher fait aussitôt le tour du monde. La stupeur est totale. Le choc, immense.

Rapidement, les premières pistes évoquent un complot d’ampleur inédite. Une trentaine de mercenaires colombiens sont arrêtés  peu après l’attaque. Leur présence, tout comme l’implication présumée de ressortissants haïtiens et américains, met en lumière un réseau aux ramifications multiples.

Des noms d’hommes d’affaires, d’anciens responsables politiques, de membres de la diaspora et même d’anciens informateurs de la DEA (Drug Enforcement Administration) sont cités. L’entreprise de sécurité CTU, basée à Miami, apparaît au cœur des premières accusations.

Mais au fil des mois, une autre interrogation émerge : comment un tel commando a-t-il pu agir sans résistance dans l’une des résidences les mieux gardées du pays ? Les gardes du corps, présents cette nuit-là, n’ont opposé aucune défense. Plusieurs d’entre eux seront arrêtés, mais les raisons de leur silence restent obscures.

Alors que l’enquête piétine en Haïti, minée par l’instabilité politique, l’ingérence et la peur, c’est aux États-Unis que les premiers procès s’ouvrent. Plusieurs suspects plaident coupables devant des juridictions américaines, notamment en Floride. Mais si certains exécutants sont jugés, les commanditaires, eux, restent invisibles.

L’enquête, cloisonnée entre plusieurs pays, ne parvient pas à établir une version claire et incontestable des faits. Des témoignages disparaissent, des preuves se volatilisent, des pistes se ferment sans explication.

Depuis ce jour tragique, Haïti s’enfonce dans un chaos sans précédent et sans president. L’absence de pouvoir légitime ouvre la voie à une prise de contrôle progressive par les gangs armés. Port-au-Prince devient une zone de non-droit. L’économie s’effondre. Les institutions sont paralysées. La population, déjà éprouvée par la pauvreté, l’insécurité et les catastrophes naturelles, perd peu à peu espoir.

Ce 7 juillet 2025 marque le quatrième anniversaire de l’assassinat de Jovenel Moïse. Et pourtant, l’affaire reste irrésolue. Aucune version officielle crédible. Aucun procès équitable en Haïti. Aucune réponse définitive sur les véritables instigateurs.

Ce magnicide, le premier d’un chef d’État haïtien depuis plus d’un siècle, reste une énigme, un gouffre béant dans l’histoire contemporaine du pays.

Le meurtre de Jovenel Moïse n’est pas seulement un crime politique. Il est le révélateur d’un État défaillant, d’institutions délitées, d’une communauté internationale impuissante ou complice. Il symbolise aussi le danger qui guette toute démocratie affaiblie : celui de voir la vérité enterrée avec les morts.

Quatre ans plus tard, une question demeure : qui a tué Jovenel Moïse… et pourquoi ?

Dieunel Bellegarde