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1er novembre 2025: un silence qui tue au cimetière de Port-au-Prince

Port-au-Prince — Le 1er novembre, jour de la commémoration des morts, le cimetière général de Port-au-Prince, jadis lieu de rassemblement et de ferveur populaire, offre cette année le visage d’un silence inquiétant. L’insécurité qui gangrène la capitale a réduit au minimum les célébrations traditionnelles. Les habituelles foules de pèlerins, d’adeptes du vodou et de curieux ont disparu, remplacées par la peur et la désolation.

Autrefois, des centaines de personnes affluaient des différents quartiers de la capitale pour honorer leurs défunts. Les visiteurs nettoyaient les tombes, déposaient du pain, du café ou du clairin, et accomplissaient les rituels en usage. D’autres recherchaient la bénédiction des loas, espérant obtenir un signe ou une révélation. Pour certains, c’était aussi un moment de curiosité, marqué par les transes spectaculaires des adeptes guedé, figures emblématiques de cette célébration nationale.

Mais en ce 1er novembre 2025, le contraste est saisissant. Le cimetière, situé au cœur d’une zone devenue théâtre d’affrontements armés, est désormais inaccessible. À l’entrée principale, rue de l’Enterrement, des carcasses de véhicules calcinés et des tas d’ordures jonchent le sol. L’endroit, autrefois animé par la ferveur populaire, n’est plus qu’un espace abandonné où la végétation a pris le dessus.

Selon la Police nationale d’Haïti (PNH), plusieurs individus armés auraient utilisé le cimetière comme refuge. Une partie du mur d’enceinte, notamment du côté de la rue Monseigneur Guilloux, a été détruite lors d’opérations policières. L’accès au site est désormais extrêmement risqué, limité à une observation rapide depuis un véhicule empruntant la voie.

Ce climat de violence prive les Haïtiens d’un moment important de leur culture et de leur spiritualité. La fête des morts, profondément ancrée dans la tradition vodou, représente bien plus qu’un hommage aux disparus : elle incarne le lien entre la mémoire, la foi et l’identité nationale.

L’insécurité à Port-au-Prince n’a donc pas seulement des conséquences économiques ou sociales. Elle touche aussi le patrimoine immatériel du pays, en réduisant au silence des pratiques qui, depuis des générations, rythmaient la vie culturelle et spirituelle d’Haïti.

Au cimetière général, le silence du 1er novembre témoigne moins de la paix des morts que du désarroi des vivants.

Dieunel Bellegarde